Selon une étude récente menée par des chercheurs de l’Université Hébraïque de Jérusalem, le jeûne répété déclenche un mécanisme de mémoire cellulaire dans le foie, améliorant sa réponse lors de jeûnes ultérieurs.
Publiée dans Nucleic Acids Research, cette étude révèle un lien entre le jeûne un jour sur deux (ADF) et la capacité du foie à s’adapter par une activation accrue des gènes et une production renforcée de corps cétoniques, une source d’énergie alternative utilisée lorsque le glucose est indisponible, comme pendant le jeûne.
« Notre étude montre comment le foie s’adapte à des jeûnes répétés grâce à un mécanisme de type mémoire qui le prépare à de futures périodes de jeûne », explique le Dr Ido Goldstein, chercheur principal de l’Institut de biochimie, sciences de l’alimentation et nutrition à la faculté Robert H. Smith d’agriculture, d’alimentation et d’environnement de l’Université Hébraïque. « Ce processus de sensibilisation des activateurs souligne l’extraordinaire capacité du foie à répondre de manière dynamique à des états nutritionnels récurrents. »
Le jeûne provoque des changements métaboliques chez les mammifères, permettant la production de glucose et de corps cétoniques comme source d’énergie en période de pénurie alimentaire. Ce processus est piloté par des changements transcriptionnels dans le foie (modifications de l’expression des gènes).
L’équipe du Dr Goldstein a étudié l’effet d’événements de jeûne répétés, tels que l’ADF, sur ce programme transcriptionnel. Les résultats ont montré que les souris soumises à l’ADF répondaient différemment à des jeûnes ultérieurs par rapport à celles effectuant un premier jeûne.
Le jeûne est ancré depuis longtemps dans les traditions religieuses et les rituels de foi, comme Yom Kippour dans le judaïsme, le Ramadan dans l’islam, le carême dans le christianisme et divers rituels de l’hindouisme et du bouddhisme. Ces pratiques impliquent souvent des périodes répétées de jeûne, soulevant des questions sur la manière dont le corps s’adapte à ces états nutritionnels modifiés.
Le jeûne intermittent, prolongé ou à durée limitée gagne également en popularité comme outil de santé globale et de gestion du poids. On lui attribue de nombreux avantages, comme l’amélioration de la santé métabolique, le contrôle du poids et, potentiellement, une longévité accrue.
Les chercheurs de l’Université Hébraïque ont découvert qu’après une semaine de jeûne un jour sur deux, la production de corps cétoniques augmentait. Pendant les périodes d’alimentation, l’expression des gènes et les niveaux de cétones revenaient à la normale, montrant que des gènes clés de la cétogenèse étaient davantage activés lors du jeûne. Les bénéfices de l’ADF semblent donc liés à cette capacité cétogène renforcée, et non à une réduction des calories ou de la masse corporelle.
Ces découvertes offrent une meilleure compréhension de la manière dont des signaux environnementaux répétés, comme le jeûne, modulent le comportement cellulaire et l’adaptation métabolique. Au-delà du jeûne, cette recherche ouvre de nouvelles pistes pour explorer comment la régulation transcriptionnelle médie les réponses à d’autres stimuli environnementaux récurrents, avec des applications potentielles en science nutritionnelle et en santé métabolique.
Article de recherche :
Repeated fasting events sensitize enhancers, transcription factor activity and gene expression to support augmented ketogenesis, disponible dans Nucleic Acids Research.
Chercheurs :
Noga Korenfeld¹, Meital Charni-Natan¹, Justine Bruse², Dana Goldberg¹, Dorin Marciano-Anaki¹, Dan Rotaro¹, Tali Gorbonos¹, Talia Radushkevitz-Frishman¹, Arnaud Polizzi², Abed Nasereddin³, Ofer Gover¹, Meirav Bar-Shimon¹, Anne Fougerat², Hervé Guillou², Ido Goldstein¹
Institutions :
- Institut de biochimie, sciences de l’alimentation et nutrition, faculté Robert H. Smith d’agriculture, alimentation et environnement, Université Hébraïque de Jérusalem, Rehovot, Israël
- Toxalim (Centre de recherche en toxicologie alimentaire), INRAE, Université de Toulouse, France
- Laboratoire de génomique, centre de recherche, faculté de médecine, Université Hébraïque-Hadassah, Jérusalem